Mercredi soir, la pièce « Conseil de famille », écrite par Amanda Sthers et Morgan Spillemaecker a conquis les spectateurs du Grand Théâtre d’Angers, secoués de rire d’un bout à l’autre de cette comédie grinçante et désopilante.
Eva Darlan, Frédéric Bouraly, Erwan Creignou et Maud Le Guénédal, dans la pièce « Conseil de famille »
Amanda Sthers et Morgan Spillemaecker signent ici une comédie grinçante à la fois cruelle et désopilante. Mise en scène par Eric Civanyan, l’histoire se déroule chez Florent (Frédéric Bouraly), chef d’entreprise radin et célibataire, qui reçoit son frère Ben (Erwan Creignou), auteur de BD érotiques au caractère molasse, et sa sœur Fanny (Maud Le Guénédal), mère de famille, au régime depuis la veille, pour un dîner avec leur mère (Eva Darlan). Le décor moderne, représente un salon et une cuisine séparés d’une cloison. Assez épuré, avec une dominante de blanc, il permet de mettre en avant le jeu des comédiens qui excellent dans leur interprétation. Les scènes alternent entre les deux pièces avec un jeu de lumière douce, légèrement bleue, pour des apartés entre les protagonistes de la soirée.
« J’ai pas fait un AVC, juste un petit coma éthylique. »
(la mère)
Juste avant que leur mère n’arrive, la fratrie discute de la situation de cette dernière, notamment de l’éventuel financement de la maison de retraite, étant donné qu’elle vient de faire un AVC et vit seule depuis le décès de leur père. Florent, chef d’entreprise, emploie sa soeur et aide son frère à régler son loyer. Il pose alors la question de manière frontale : « Si je ne vous coupe pas les vivres, on fait quoi de maman ? ». Face à cette problématique financière, ils en viennent à une solution machiavélique et radicale. « On a qu’à la buter tout simplement ! », lance Fanny. « On va la sauver. Et pour la sauver, on va la buter. », rétorque Florent. Alors qu’ils ne sont pas unanimes sur cette décision, la mère fait son entrée, essoufflée : « Oh, je suis morte ! … Tu sais que ton ascenseur est en panne ? ». Le ton est donné, acide et drôle et déconcertant.
De révélations en retournements de situation, bien évidemment, la soirée ne se passe bien évidemment pas comme prévu et les langues se délient jusqu’au dénouement final. Alors que la fratrie tentent de s’accorder sur son plan machiavélique, la mère et son franc parlé, est une véritable tornade d’impertinence, révélant ce qu’elle a sur le cœur depuis trente ans. Sans filtre, elle évoque également les soirées où elle profite de cocktails écologiques « le cubanito : un arbre planté pour un mojito acheté ! », ses amants, et surtout sa sensation d’avoir raté sa vie à cause de ses enfants. Elle finit par leur suggérer de profiter de la vie au lieu de se la pourrir avec leurs angoisses et leurs certitudes.
Pendant près d’une heure trente, les quatre comédiens interprètent avec brio leur personnage. Leur jeu de scène est énergique, délicieusement pertinent, irrésistiblement drôle. Mention spéciale à Eva Darlan et sa pêche d’enfer, communicative, qui emporte la salle avec elle dans la folie douce de son personnage. Les répliques cinglent, tellement drôles, malgré la cruauté et la violence de la situation. Face à cette situation explosive, où finalement personne ne s’aime vraiment, le public n’hésite pourtant pas une seconde entre rire et tension. Pour preuve, le nombre incalculable de sourires sur le visage des spectateurs, à la sortie du théâtre.
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